Le père Pierre-Marie Delfieux, fondateur des Fraternités monastiques de Jérusalem, est retourné à Dieu ce 21 février 2013.
Après deux années passées au désert à Tamanrasset, le père Pierre-Marie a eu l’intuition que nos villes étaient de bien plus grands déserts spirituels que les étendues de pierre et de sable les plus arides. Il a fondé les Fraternités monastiques de Jérusalem en 1975 afin de « prier au coeur des villes », et a investi pour cela l’église Saint-Gervais-Saint-Protais (la cousine parisienne de la basilique Saint-Vincent) alors quasiment à l’abandon.
Depuis, les Fraternités ont essaimé à Vézelay, au Mont-Saint-Michel, à Strasbourg, à Bruxelles, à Cologne, à Montréal, à Florence, à Rome, à Varsovie, et les laudes et l’office du milieu du jour à l’église Saint-Gervais sont retransmis en direct sur KTO TV.
Les membres du conseil presbytéral de M. Raffin seraient bien inspirés d’aller à Paris assister en semaine aux vêpres de 18h et à la messe de 18h30, et voir ainsi cette église pleine de gens sortant du travail, de tous âges et de toutes classes sociales.
Entourée de deux lycées, d’un hôpital, d’un campus universitaire, d’une auberge de jeunesse, d’une MJC, du conseil général, du conseil régional, de la préfecture, d’une piscine, d’un commissariat de police, d’une caserne de CRS, d’une caserne de hussards, de l’UEM, et bien sûr de nombreux logements, comment ne pas imaginer la basilique Saint-Vincent pleine également sous l’égide d’un prêtre motivé ou d’une communauté dynamique ?
L’Eglise catholique qui est à Metz sait-elle que l’insécurité grandit dans ce quartier ? Vient-elle de temps en temps voir les messages laissés par les lycéens sur les portes de la basilique ?
A quoi pourra donc bien servir à ces jeunes gens un énième lieu de culture à usage profane digne ?
Puisse l’oeuvre du père Pierre-Marie continuer à essaimer et à inspirer prêtres et religieux dans toute la France, et tout particulièrement dans le diocèse de Metz.
Addendum 6 mars 2013 : extrait d’un article publié par France Catholique et traduit de The Catholic Thing :
« Le Frère Pierre-Marie Delfieux, fondateur des Fraternités de Jérusalem — mouvement de renouveau particulièrement vivant, centré à l’église Saint-Gervais/Saint-Protais à Paris avec des antennes en expansion en Europe et au Canada — nous a quittés, et a été inhumé pratiquement sans couverture médiatique. La messe célébrée à Notre-Dame à Paris a rassemblé une foule immense, avec de nombreux jeunes collégiens et lycéens. Des centaines de prêtres, et une douzaine d’évêques participèrent à une magnifique et émouvante célébration — un aspect attachant typique de la Fraternité.
Je n’ai entendu parler de cet événement que grâce à un ami qui, m’ayant fait connaître Saint-Gervais voici quelques années, a pensé avec raison que j’apprécierais l’information. Dans le tohu-bohu déclenché par la renonciation du Pape et les spéculations sur son successeur, il ne fallait sans doute pas s’attendre à ce que la presse ait encore une goutte d’énergie à consacrer à une information catholique de tout autre nature — et cependant importante en Europe, et, mieux, dans la France laïque. Et puis, ce n’est pas dans le droit fil des commentaires soigneusement entretenus sur la crise profonde de l’Église.
Emblématique de notre époque est l’oubli de ce qui marche bien, très bien, comme beaucoup de choses au sein de notre Église Catholique, alors que nombre de gens, y compris beaucoup de catholiques, ne s’intéressent qu’à ce qui va de travers. Le scandale est le meilleur marchand de journaux, il en sera toujours ainsi, naturellement. Et pourtant, il y a bien des événements méritant notre attention si on veut une vraie photo du Catholicisme en cet instant de l’histoire de l’Église. (…)
L’Église commet aussi une erreur en essayant trop vigoureusement d’entrer dans le monde. Karl Barth, le plus grand théologien protestant du vingtième siècle, relevait à l’issue du Concile Vatican II (il y était invité mais, malade, ne put y assister) : « Est-on bien certain que le dialogue avec le monde doive passer avant la proclamation vers le monde ? » C’est une invitation à adopter une posture prophétique, pas une pacifique campagne de marketing. Le programme de Vatican II d’engagement social des catholiques, « Gaudium et Spes » en particulier, a frappé Barth comme non seulement exagérément optimiste mais un peu à côté de la plaque quant à la compréhension du monde selon le Nouveau Testament. Il rappelle qu’au cours des siècles le Christianisme s’est souvent heurté au « monde ».
Il nous faudra réfléchir à tout cela, et à bien d’autres vérités qui nous interpellent au cours des jours et semaines à venir. Mais, comme Pierre-Marie Delfieux et la Fraternité qu’il a fondée nous le montrent, il existe des réponses, de bonnes réponses, aux défis qui nous sont lancés. Elles peuvent venir d’un grand pape réformateur, tel Grégoire VII, ou, peut-être — comme à Cluny et Clairvaux, par la fondation d’ordres, comme les franciscains, les dominicains, les jésuites — jaillir d’élans spirituels que nul ne saurait anticiper — jusqu’à leur venue.
Ça s’est déjà produit dans le passé, et ça se produira certainement à l’avenir. Oremus, prions. »